R O M A N S
6/06/2011

La commissaire n’a point l’esprit club

Georges Flipo

 

Éditions La Table Ronde

286 p /18 €

La commissaire n’a point l’esprit club

Nous sommes sur l’île de Rhodes, à Lindos, village de vacances grec genre « club Med » mais portant le nom de l’Esprit club. Les animateurs (les cocos pour les hommes et les kikis pour ces dames) organisent de temps en temps une sorte de rituel qui consiste à cogner, à l’aide de perches, un mannequin pendu à un mât. Les chéris (c’est comme ça que se nomment les vacanciers) doivent tout en cognant l’épouvantail, danser une sorte de carmagnole (mais sans le son du canon). Cette fois-ci, ce ne sont pas des vêtements garnis de paille sur lesquels ils tapent mais sur un vrai mort suspendu au bout d’une corde. L’autopsie révèle qu’il a été tué avec une sorte de stylet d’un seul coup en plein cœur. La victime est le « King », le chef du village et non pas Elvis Presley. Dans ce camp, comme certainement dans tous les endroits identiques, on voit de tout. Du blanc, genre cuvette de w.c ou du rouge écrevisse (cuite) prête à recevoir sa dose de biafine.

La commissaire Viviane Lancier et le lieutenant Willy Cruyff sont chargés de l’enquête. Des policiers français ? Ben oui, pour ne pas faire trop de remous et employer au minimum la police grecque.

A partir de là, l’auteur va mélanger les prouesses de dragueur du « lieut' » latin lover et la parano de sa cheftaine directe, la commissaire. Il va nous narrer une intrigue dans laquelle il met beaucoup d’humour.

 

Georges Flipo, que je découvre, m’a emballé par ses descriptions très réalistes et la finesse de son suspense. Un bon bouquin que vous prendrez plaisir à lire, j’en suis sûr.

Patrice Farnier


L’année où Rosetta a été tuée

Alessandro Perissinotto

 

Éditions Odile Jacob

192 p / 19 €

L’année où Rosetta a été tuée

Curieux petit livre (moins de 200 pages) qui a attiré mon attention. En fait, le récit est double avec, en italique les pensées du personnage central c'est-à-dire le commissaire, et le reste étant le récit. A l’occasion du décès d’une lointaine parente, ce dernier est chargé d’enquêter sur la mort d’une jeune femme, Rosetta, survenue vingt ans auparavant. On n’a jamais su pour quelles raisons cette jeune femme avait été tuée de façon tragique. Nous voilà donc dans un village retiré du Piémont en plein hiver, ce n’est pas l’idéal pour découvrir les beautés de la montagne. La neige et le mauvais temps font que le bistrot devient le point de ralliement.

Pourtant, des personnes en haut lieu ont demandé la réouverture de cette affaire restée mystérieuse. La plus grande discrétion est exigée et la seule personne à être dans la confidence est le maire du village. Par lui, le commissaire espère savoir comment orienter son enquête car il ne dispose d’aucun élément qui pourrait lui venir en aide. Par chance, l’homme est un bavard, il lui suffit de l’écouter. De plus, en côtoyant les villageois assez rustres et avares de paroles, il devrait tout de même recueillir quelques éléments utiles à son enquête. Il ne lui restera alors qu'à les relier entre eux et, en s'immergeant dans la mythologie locale et les croyances religieuses, il lui sera possible de reconstituer une partie de la vie de ces gens retranchés du monde. Certains faits ainsi récoltés, lui permettront de découvrir les circonstances ayant entraînées la mort de la jeune Rosetta.

 

Sûrement intrigué par les premières pages, le lecteur se laisse peu à peu emporter dans une intrigue originale. Contrairement à beaucoup de romans savamment orchestrés pour mieux vous perdre, ici, la simplicité et le style direct concourent à rendre ce livre attachant. Une agréable surprise pour ma part et que j’aimerais vous faire partager.

Dany Neuman


Les ombres du souvenir

Roger Martin

 

Le Cherche Midi éditeur

362 p / 18 €

Les ombres du souvenir

Nous sommes dans un endroit qui ressemble à s’y méprendre à un camp de concentration. Mais nous sommes aujourd’hui, c’est donc un lieu d’internement, quelques part en France, en Lozère dans le Gévaudan. On assiste à une évasion, malheureusement, elle va mal se terminer. L’évadé, bien aidé en cela par un surnommé K-po, va se faire boulotter par les loups réimplantés dans la région quelques années auparavant. K-po ou kapo me rappelle un film que j’ai vu au début des années soixante, un film italien réalisé en 1959 par Gillo Pontecorvo avec Susan Strasberg et Laurent Trezieff. Oscar du meilleur film étranger en 1961.

Mais revenons au livre, il y est question d’un centre de réinsertion, qui je pense n’a jamais réinséré personne, mais il faut bien dépenser l’argent du contribuable, non ?

Ce centre est surtout destiné aux expérimentations médicales sur des êtres humains. Il doit aussi servir de lieu de tournage de films pornographiques du genre nazi porn.

Le lieutenant David El.Kaïdi mène une enquête qui va le conduire à s’intéresser de plus près aux agissements d’un certain colonel à la retraite pas vraiment net. Je signale au passage les lectures de notre flic: »Camino 999 » de Catherine Fradier ou « Frontière » de Patrick Bard, des livres qui ne vous laissent pas indifférents.

Il va de soi que l’auteur dénonce, et il a raison, certains politiciens pourris et flics véreux. Il nous rafraichit la mémoire en nous parlant de « type aryen » et de la mégalomanie d’un petit caporal autrichien. Vous voyez de qui je veux parler ?

 

Très bon roman, monsieur Roger Martin.

Patrice Farnier


Captif
Neil Cross

Editions Belfond

351 p / 18 €

Captif
En sortant de l’hôpital où il a passé une IRM, Kenny Drummond, la quarantaine, apprend qu’il n’en a plus que pour six semaines à vivre. Avant de mourir, il décide de dresser une petite liste des gens qu’il tient à remercier.

Il appelle au téléphone Mary avec qui il a été marié. Ils sont restés en bon termes. Mary elle, s’est remariée avec Stever, ils ont deux enfants, tous apprécient Kenny. Il n’a pas osé lui dire qu’il n’en avait plus pour longtemps, mais Mary a bien senti qu’il lui cachait quelque chose. Aussi décide-t-elle de contacter une amie de Kenny, Pat Maxwell, policière à la retraite. Cette dernière ne s’étonne donc pas de recevoir un appel puis la visite de Kenny. Pat vit dans un mobile-home de façon simple mais c’est ce qui lui convient et la rend heureuse. Il lui demande un service, retrouver quelqu’un. Qui Kenny veut-il retrouver avant de mourir ? Tout simplement la petite fille qui fut sa voisine sur les bancs de l’école et qui avait été gentille avec lui, contrairement aux autres, elle s’appelait Callie.

Voulant être agréable à son ami, Pat va engager à ses frais, Pat Sugar, un détective minable et endetté jusqu’au cou. Grâce à lui, Kenny apprend ce qu’est devenue Callie, elle s’est mariée avec Jonathan Reese, un paysagiste, ils n’avaient pas d’enfant. La police garde la trace d’une dispute entre les époux, mais tout était rentré dans l’ordre jusqu’au jour où Callie avait disparue sans laisser de trace. Soupçonné, son mari n’avait jamais été inculpé. Grâce à tous ces renseignements, Kenny se rend chez Jonathan Reese, pénètre chez lui par effraction et fouille sa maison. Il y restera même une nuit entière, caché dans le grenier à cause du retour imprévu de Jonathan. Grâce à des indices qu’il a trouvés, Kenny est persuadé que celui-ci est le meurtrier de son épouse même si la police, à l’époque, n’avait pu le prouver. Il décide de l’enlever et de le séquestrer dans le cottage qu’il possède. Là, va commencer un terrible face à face avec, d’un côté, un homme qui n’a plus rien à perdre et veut connaître la vérité, et de l’autre, un homme prêt à confesser ce que l’autre veut entendre. Pris dans un engrenage fatal, Kenny à bout de force, est entraîné malgré lui dans une situation inextricable.

 

Un scénario diabolique et d’une intensité remarquable, ce second roman traduit en français de Neil Cross n’a rien à envier au précédent « L’homme qui rêvait d’enterrer son passé ». Déjà ce dernier exploitait le thème d’un homme pris dans un piège dont il ne sait comment se sortir. Malgré quelques scènes sanglantes à la limite du grand guignol, le lecteur est tellement pris par l’action que celles-ci ne choquent pas. Un roman intense, au suspense bien maîtrisé que vous lirez d’une seule traite.

Dany Neuman

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