Pour cette séance porte-bonheur, un polar « au féminin ».
Crime d’amour, de Alain Corneau
A l’intérieur d’une société multinationale, une jeune recrue, cheveux tirés et lunettes secrétaire de direction (Ludivine Sagnier), est subjuguée par sa supérieure hiérarchique. Celle-ci, quinqua au charme Hepburnien (Katharine), nage dans le groupe telle une sirène mutante. Kristin Scott-Thomas, Vienna de «Johnny Guitar» ayant troqué son colt contre un ordi. La relation entre les deux femmes, passant de l’admiration au mépris, via une sensualité équivoque, bascule dans la haine lorsque la dominatrice Kristin se sent vaciller de son piédestal. Because l’employée modèle, qui vient de se changer en arriviste diabolique ! La chef, accro au pouvoir, réagit en conséquence. Ce qui vaut une excursion dans les âmes sombres et une surenchère dans l’ignominie.
Soudain les héroïnes se comportent en mecs détestables. Le mi-figue mi-raisin est de rigueur. Le domicile tape-à-l’oeil de l’une et celui anonyme de l’autre, deviennent des décors glacés dans lesquels rôde la mort.
Dans ce polar noir, les hommes font de la figuration. Portables greffés, mini briefing, combines... Deux émergent du lot de cols blancs attachés-casés. Un séducteur magouilleur, par qui le drame arrive, et un cadre falot attentif qui, surprise, détient le final cut. Quand le premier passe d’une adversaire à l’autre, le glas sonne, justifiant le titre du film. S’insèrent alors de nombreux flash-back, bien placés, et qui dévoilent au fur et à mesure une machination terrifiante. Le stress au boulot n’est rien à côté de ces «sœurs ennemies» à l’interprétation brillante ! La musique, non envahissante, contribue à la montée de l’angoisse.
Pour ce film à la psychologie féminine, l’avis de Sylvie S. est le bienvenu. « ... 2 spectateurs sont sortis de la salle. A la séance suivante, 16h, nous étions 2. Dommage. Bref ! Le film, psychodrame noir de couleur, ne reflète pas le titre car de l’Amour il n’y en a guère, ou Amour possession-pouvoir, ce qui ne rime pas. Histoire de femmes, de rivalité entre CST, la «patronne classe chic ambitieuse» d’une grande société «de fric», et son adjointe Isa, jouée par LS, excellente elle aussi. Celle-ci est jalouse de sa directrice au comportement ambigu, pas sain et très tordu. Isa l’admire au début, puis l’envie. Jalousie, douleur, haine, jusqu’au crime. Se débarrasser de Christin pour prendre sa place. Un crime minutieusement préparé, dans les moindres détails. Diabolique. Réussi. Sauf que… Un excellent moment de Cinéma. Merci Alain Corneau. » L’analyse de Sylvie, directe et efficace, me donne envie d’y retourner.
Ce dernier film de Corneau m’a rassuré. Rester sur le remake du «Deuxième Souffle» de Melville/Giovanni aurait été injuste...
Suspect Zero, de E. Elias Merhige
L’enfer est au bout de la traque, déclame-t-on sur l’affiche. Pour ma part, l’enfer s’installe dès le générique, avec tous les ingrédients du film : Affichette disparition enfant, camion frigorifique, pluie, obscurité, coin paumé... et le visage en gros plan de Ben Kingsley, véritable tronche de tueur.
De se retrouver dans un bureau du FBI, en compagnie d’un enquêteur costume cravate, nous détend. Mais très vite on replonge. Des disparitions à la pelle dans tous les Etats-Unis. Des meurtres qui, apparemment, n’ont aucun lien entre eux... Des visions. Des phénomènes parapsychologiques chez le coupable et le policier... De toute façon, pour nous, c’est mister Ben le Kidnappeur-tueur ! Jusqu’à ce qu’on sache ce que veut dire «Suspect Zero». Les agents du FBI étudient la possibilité d’être confronté à un serial, du fait que les homicides suivent une même procédure. Mais si le coupable changeait, et agissait sur des milliers de kilomètres ? En camion, par exemple. En attendant, il envoie des énigmes à ses chasseurs.
Les enquêteurs étudient les prémonitions que Ben (en fait, ex-agent S.0) note et dessine à en perdre la raison. En espèce de justicier. Le FBI, lui, a formé des «Frankenstein» assermentés devenus incontrôlables. « Débranche-moi », supplie Ben à l’agent victorieux. Mais ce dernier disjoncte à son tour et... Faut suivre !...
Un bon thriller «télépathe».
The Town, de Ben Affleck
Pléthore de braquages de banques à Charlestown, quartier de Boston. Doug, très compétent en ce domaine, tombe, hélas, sous le charme de la directrice d’un des établissements attaqués. Il trouve un subterfuge pour la revoir. Elle s’éprend de lui, au grand dam de ses frères d’arme.
Il parvient à duper la jeune femme sur ses véritables occupations mais, vite, se retrouve coincé entre un de ses complices particulièrement violent et un agent du FBI qui guette avec patience un faux pas de la bande...
Une histoire classique, avec amitié, amour, et le fameux «dernier coup». Cousu de fil blanc. Certes. Ça fait pourtant du bien de temps à autre d’échapper au propos politique faufilé, au gore surjeté et au sexe ourlé.
Et puis, durant tout le film, grâce aux acteurs, j’ai cru voir Bogart en Doug et De Niro en flic. Un bonheur
Roland
Sadaune
Entracte…